Nous, Amédée, comte de Savoie et marquis en Italie, qu’il soit notoire à tous ceux qui les présentes verront, que, nous, considérant la bonne affection que nos chers bourgeois et habitants de Seyssel ont et ont eu depuis longtemps pour nous et les nôtres, en notre nom et en celui de nos successeurs, à la perpétuité, nous concédons et donnons les droits et libertés pour qu’ils soient régis de la meilleure manière que cela se peut entendre.
Ces droits et libertés sont ceux-ci, savoir : Tout homme qui vient à Seyssel et y demeure un an et un jour, si quelqu’un s’enquiert qui il est, est libre sans difficulté. Et quiconque a acquis peut donner et vendre à qui il veut et s’éloigner librement, et la ville doit le conduire, veiller à sa sûreté, pendant un jour et une nuit.
Si un bourgeois meurt sans héritiers et n’a pas fait de testament, le seigneur de cette ville doit remettre ses biens à deux hommes probes du Conseil des prud’hommes et ceux-ci doivent les garder un an et un jour. Et si dans l’année il se présente un légitime héritier, il doit les délivrer.
Et s’il n’en vient pas, le seigneur, sur l’avis des prud’hommes, doit en faire une aumône. Et s’il reste quelque chose à hériter, il doit l’avoir.
Et si quelque marchand ou pélerin ou voyageur meurt, la même chose doit être faite.
Règlement du marché.
Si quelqu’un rompt le marché, les bourgeois doivent faire payer à celui qui l’a rompu une amende de 60 sous. Celui qui vend en cachette sans payer la leyde doit 60 sous. S’il la fait remettre par quelqu’un d’autre, il est quitte. Et si celui qui est censé la remettre ne trouve personne à qui la remettre, il doit la déposer sur la pierre prévue à cet effet.
Le bourgeois ne doit pas la leyde ni le péage après qu’il a demeuré dans la ville un an et un jour.
Celui qui vient au marché doit la leyde, d’après le statut (loi de l’état), et du moment où il quitte sa maison jusqu’à ce qu’il soit rentré chez lui, qu’il soit en sûreté.
Si quelqu’un vient au marché et tombe malade, il doit être secouru dans quelque lieu qu’il soit jusqu’à ce qu’il puisse retourner dans sa maison.
Celui qui dans la ville libre, frappe du poing, doit 3 sous, de la paume 5 sous. Celui qui tire son couteau 60 sous. Celui qui sort à moitié son épée 60 sous, qui tire sa lance d’une coudée hors de sa maison 60 sous, qui frappe d’une pierre 60 sous. Celui qui lance une pierre, de manière que le coup blesse, soit en dehors soit en dedans, 60 sous. Celui qui arrache ou tire les cheveux d’un autre avec les deux mains, 10 sous, qui répand le sang de manière qui apparaisse, 60 sous. Celui qui frappe d’un bâton 3 sous. Celui qui rompt violemment la maison de son voisin 60 sous. Si un garçon ou une fille dit quelque chose de grossier à un honnête homme ou à une femme et que l’honnête homme ou la femme lui donne un soufflet, il ou elle ne doit pas d’amende. La femme doit la moitié de ce que doit payer un homme.
Le seigneur de la ville peut faire apporter devant lui toutes les mesures, et s’il en trouve une fausse, celui qui s’en sert payera 3 sous. Celui qui pour le même poids de marchandise se sert abusivement de deux mesures, une grande pour acheter et une petite pour vendre, sera puni et la punition sera laissée à la discrétion du seigneur.
Qui commet l’adultère doit l’amende selon le statut de l’état.
Celui qui produit une caution pour une accusation publique d’une chose cachée, le seigneur fait une enquête et si la chose n’est pas établie, l’amende prévue par la loi sera doublée, et pour l’accusation publique il paiera 3 sous. En cas d’expédition militaire, tous doivent suivre le seigneur un jour et une nuit à leurs frais, au-delà une somme d’argent leur sera versée.
Si le seigneur lève une armée et lance sa proclamation (son ban), celui qui ne veut pas y aller doit 60 sous, à moins qu’il ne fournisse une excuse raisonnable. Les maisons qui fournissent des soldats ne doivent pas en plus le service de garde, à moins que les bourgeois ne les aient achetées.
De même, dans les limites de la ville, nul ne doit être saisi, s’il n’est voleur ou traître.
Tout tavernier doit une coupe de vin à la fête de St-André. Celui qui vend une maison ou un bâtiment quelconque doit au seigneur une coupe de vin, et le cordonnier doit des souliers à la fête de St-Martin de cette ville.
Celui qui prétend produire une caution contre une plainte publique, le seigneur s’enquiert de ce cautionnement et si la plainte s’avère justifiée, l’amende prévue par la loi sera doublée. Pour l’accusation publique 6 deniers
Tous doivent le guet et le logement aux chefs et aux soldats.
Tout tavernier qui vend du vin toute l’année, et tout autre qui en vend à la fête de St-Martin, doit une coupe de vin équivalente au 16ème de la charge que peut porter un cheval.
Le boulanger doit une miche de pain, de même le cordonnier doit prendre deux souliers avec les deux mains, et celui qui perçoit la leyde doit ensuite les prendre. Et le pain et les souliers doivent être perçus à la fête de St-André.
Les bouchers doivent les langues des bœufs et des vaches, de quelque lieu qu’ils viennent.
Un marchand étranger doit une obole le jour de marché. Un cordonnier étranger une obole. Un boucher étranger doit la leyde.
Pour un boeuf un denier, pour une vache 2 deniers, pour les autres petites bêtes 1 obole, pour un cheval 4 deniers, pour un âne 4 deniers. Pour 12 aunes de toile 1 denier. Bêtes de somme 1 obole. Pour toutes choses qui se vendent, savoir : les verres, les pots, marmites et autres choses, on prendra jusqu’à 2 sous pour la leyde.
Les bâtiments qui donnent sur la rue doivent 2 deniers par toise. Les autres non.
L’adultère ne peut être prouvé par les serviteurs du châtelain ni par le châtelain lui-même si ce n’est d’après le mode commun, par deux loyaux hommes qui soient de la ville et qui aient vu l’adultère en œuvre.
Tout marchand étranger qui vend des draps sur la place publique doit 4 deniers.
Celui qui préside à la ville doit tout faire avec le conseil des prud’hommes de la ville. Celui-ci délibérera en commun pour autoriser ou non quelqu’un à s’établir dans la ville.
Si quelqu’un répand un faux bruit, il doit 3 sous. Si quelqu’un frappe du pied, il doit 10 sous. Si un marchand vend quelque marchandise, il ne doit pas la vendre à un second acheteur avant que le premier qui a désiré l’avoir ne se soit retiré.
Tout homme peut vendre sa maison à qui il veut, librement et en toute autorité, et celui qui l’achète doit payer le cens (droit de mutation) au seigneur, dès le moment où la maison change de maître.
Celui qui tue un bœuf ou une vache pour son usage ne doit pas la langue.
Les chapelains et clercs sont libres et ne doivent pas contribuer aux dépenses communes, ni à la défense de la ville.
Ceux de la ville peuvent en placer les confins, les limites loin ou près, comme il leur plaît.
Celui qui est juré (bourgeois) ne doit pas la leyde, après qu’il a demeuré dans la ville un an et un jour, de quelque ville qu’il soit; il doit cependant contribuer aux dépenses communes.
Celui qui vend un sac de sel doit une obole.
Celui qui a été frappé dans un bois ou de nuit peut prouver la lésion par un seul témoin; et s’il ne peut la prouver, que celui qui est accusé prête serment qu’il ne l’a pas fait, et ainsi il est quitte. Si quelqu’un a été frappé et que le coupable ait payé 60 sous d’amende, il devra être donné 30 sous au frappé, et ainsi la moitié de l’argent de l’amende doit être donné au frappé ou à tout autre plaignant.
Celui qui insulte quelqu’un dans sa maison doit le double de ce que la loi prévoit.
Celui qui veut venir dans la ville, doit auparavant satisfaire à son seigneur.
Quelque impôt ou charge que les bourgeois veuillent établir, le châtelain doit le concéder (pour qu’il soit valable).
Si le comte veut avoir des fours et des moulins, qu’il les achète pour le prix qu’ils valent. Autrement, qu’ils restent à ceux qui les possèdent.
Celui qui vient à la ville, la ville doit le protéger dans son droit Et s’il vient un voleur ou un traître, la ville doit s’en emparer. Et s’il veut se défendre le châtelain doit lui faire mettre les menottes.
Et si un riche a affaire avec un pauvre, la ville doit donner un défenseur à ce dernier.
Si quelqu’un traite une autre personne de brigand, de voleur et que celui-ci ne veuille pas se défendre, l’agresseur est à la discrétion du seigneur. Quant à cette miséricorde qu’elle soit faite d’après le conseil des bourgeois de la ville.
Si le comte vient dans la ville qu’il soit reçu avec une grande joie, et que celui qui veut le servir gratuitement le serve. Le comte n’a nul droit de vendre le ban de la ville. Nul ne peut recevoir une citation (assignation en justice) sur le marché, à moins que sa vente ne soit faite ou qu’on lui garantisse son marché. Si la citation est faite un autre jour, elle peut être reçue ces jours-là sans le châtelain. Celui qui vend du blé, des poissons et du pain ne doit pas la leyde.
Si un voyageur passe par la ville, on ne doit rien retenir de ce qui lui appartient, mais justice doit lui être faite aussitôt.
Ensuite nous disons, nous voulons et concédons à nos dit bourgeois que ceux qui - dans des usures manifestes ou cachées - meurent avec ou sans testament, de quelle manière et en quel lieu qu’ils meurent, on ne puisse rien exiger ni avoir, à raison de cet exercice usuraire, ni à leur mort, ni après leur mort. Si leurs propriétés et leurs biens reviennent à des héritiers ou des proches, de même nous défendons et prescrivons qu’il ne soit fait sur les biens de tels défunts aucun séquestre ou saysine (saisie), et si par hasard elle avait été faite, qu’elle soit nulle de plein droit, et que ceux qui auront connaissance de cette saisie ne se taisent pas, sinon ils encourront notre indignation et celle de nos successeurs dans la suite des temps, et que les héritiers ou les proches de ces défunts usent librement et en toute autorité de ces biens et choses.
Cette liberté et ces droits, tels qu’ils viennent d’être exprimés, en notre nom et en celui de nos successeurs, octroyés de bonne foi et sur le serment que nous avons prêté corporellement sur les saints Evangiles de Dieu, nous promettons de les observer et de les garder et de ne jamais les transgresser, soit pour nous soit pour d’autres.
Confessant avoir reçu de nos dits bourgeois, pour la concession de cette charte, deux cents bonnes livres viennoises. Sur quoi, pour la force et la validité de toutes ces promesses, nous avons fait apposer notre sceau aux présentes lettres.
Donné à Seyssel le samedi avant le dimanche des Rameaux, l’an du seigneur mil deux cent quatre-vingt-cinq.